Le baby blues c’est grave ?
Cet anglicisme, rentré dans notre langage courant depuis un long moment déjà, est omniprésent sans que l’on sache vraiment s’il se rapporte à un trouble mental ou à un ressenti inévitable et transitoire de toute jeune maman.
Même s’il n’est pas obligatoire pour chaque mère qui vient de donner la vie, le baby blues toucherait près de deux tiers des femmes dans les jours qui suivent leur accouchement. Il s’agit donc d’un événement tout à fait bénin qui n’a rien à voir avec la dépression du post-partum et qui est marqué par une alternance d’émotions ressenties intensément et oscillant entre tristesse, colère et anxiété. 4
Et la dépression du post-partum ?
Rien à voir avec le baby blues ! La dépression du post-partum est une véritable maladie. Elle est heureusement beaucoup moins fréquente que le baby blues mais loin d’être rare quand même. Elle toucherait 13% des mères selon les études. C’est un trouble qu’il ne faut jamais négliger car il a des conséquences sur la mère mais aussi sur la relation mère enfant. La présence d’un épisode dépressif dans cette période très importante des premiers mois après la naissance risque fort d’avoir un impact sur l’enfant et son développement ultérieur. 3
Comment la reconnaitre ?
Les symptômes de la dépression du post-partum sont les mêmes que ceux de tout épisode dépressif. On retrouve la tristesse, les idées noires, un ralentissement physique et psychique, ou encore une perte d’envie et de plaisir. Elle se caractérise par son apparition dans les jours ou les semaines suivant l’accouchement même si on parle aujourd’hui plutôt de dépression du péri-partum, incluant l’apparition d’une dépression au cours de la grossesse.1
Est-ce une maladie grave ?
Oui. La dépression du post-partum est considérée comme une forme grave de dépression pour plusieurs raisons. D’abord parce que elle est associée à un important risque suicidaire, voire à un risque d’infanticide dans certaines formes mélancoliques, même si cela reste extrêmement rare. Ensuite, elle est plus fréquente en cas de trouble bipolaire et pourrait ainsi représenter un mode d’entrée dans cette maladie chronique avec un risque de récidive dépressive ou d’apparition d’un épisode de manie. Autre élément important, l’impact sur le nouveau né avec une maman qui se retrouve en grande difficulté face à son enfant, voire dans l’incapacité de s’en occuper dans les formes les plus graves.3
Comment prendre en charge la dépression du post-partum ?
Les psychothérapies font partie de la prise en charge de la dépression. Elles offrent une alternative thérapeutique. Parfois elles peuvent être associées aux traitements médicamenteux, l’idéal étant d’associer les deux à chaque fois que cela est possible.
Comme tout épisode dépressif majeur modéré à sévère, un traitement médicamenteux pourra être envisagé. Dans ce cas, il faut être très attentif en cas d’allaitement en raison des risques de passage du médicament du sang vers le lait maternel.
Il faut savoir que si une hospitalisation est nécessaire, de plus en plus d’hôpitaux spécialisés sont équipés d’unités dites « mère-enfant », permettant d’accueillir la maman sans la séparer de son enfant afin de maintenir ce lien au combien important.2
Peut-on faire une dépression après une fausse couche ?
Une fausse couche constitue un véritable traumatisme, qui est souvent à l’origine d’une dépression. Mais on pense aujourd’hui qu’à l’inverse, la dépression peut être une cause de fausse couche.
Les liens entre dépression et fausse couche ont fait l’objet d’une étude publiée dans Human Reproduction en octobre 2002. Le questionnaire visait à évaluer les troubles psychologiques des femmes après une fausse couche. Parmi ces femmes ayant fait une fausse couche et qui étaient tombées à nouveau enceintes, 22 % ont fait une seconde fausse couche. C’est la dépression qui en était donc la cause.5
Article rédigé par le Dr. Eric Charles
Psychiatre
Références :
- https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/depression
- https://has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2011-06/protocole_had_postpartum_-_dpp.pdf
- Hatters Friedman , Resnick PJ. Women’s Heahh (2009); 5(3) 287-295
- Les maladies dépressives chez la femme. A Gérard, F Guedj. In : Les maladies dépressives. Seconde édition. Ed Médecine-Sciences Flammarion. 2003. 637 p.
- La dépression pour les Nuls. E. Charles et coll. Collection Pour les Nuls. Ed First. 2013. 382 p.
FR-NPDEP-0364 – Août 2023